108
236/24
zu Hamanns London-Reise siehe
Hamann,
Gedanken über meinen Lebenslauf
, LS S. 338ff.; einen Versuch zur Ermittlung der realen Personen und Begebenheiten bietet
Fechner (1979)
.
Londres ce
24 Janv. 1758.

25
Monsieur,

26
Monsieur
vll. Leonard Sené, siehe
Fechner (1979)
, S. 13.
Hamann,
Gedanken über meinen Lebenslauf
, LS S. 339: „er gab sich […] für einen deutschen Baron von Pournoaille aus, hatte eine Schwester in London, die […] vermuthlich von dem Russisch[en] Abgesandt[en] unterhalt[en] ward und unter dem Namen einer Frau von Perl einen Sohn hatte“.
Il y a huit jours, que je Vous ai ecrit une lettre, la quelle je trouve à

27
propos de suppleer par celle-ci, et j’aurai fini avec Vous. Je Vous rends

28
justice, Monsieur, sur deux points. Dieu! quel embarras, quelle peine de

29
s’arracher aux furies d’une passion, qui n’auroit pris racine sans avoir

30
auparavant ecrasé avec une violence barbare et tyrannique, la moindre

31
etincelle d’une conscience et pour ainsi dire, toutes les Enseignes de notre

32
Espèce – – Je fremis en m’arretant sur ce sujet et je me sens d’autant plus

33
de compassion pour Votre
situation
etat. L’autre point me regarde moi-

S. 237
meme.
Vous etez ou abusé
sur mon caractere, ou Vous Vous plaisez de le

2
meprendre à dessein par des soupçons
inutiles
frivoles. J’ai vecu avec

3
l’homme en question toujours dans une ignorance entiere de
c
ses

4
engagemens avec Vous. Je me pique d’une discretion pointilleuse pour les affaires

5
de ceux, que je vois sur un pied de familiarité, je me defends meme de

6
penetrer leurs details. S’ils me jugent digne de leur confidence, je leur paye

7
mon retour par la chaleur et par la cordialité, avec la quelle j’epouse leurs

8
interets. Votre indigne
Commilito
se ressouviendra de mon honneteté

9
envers lui, de ma facilité et de mon ardeur dans les Services, que j’ai eté

10
en etat de lui rendre. Ainsi l’ingratitude sera plutot de son coté, s’il est

11
assez lache de m’en accuser. Je lui remettrai son instrument, dont j’ai

12
toujours refusé le present, et une paire de boutons, qu’il m’a
offert une fois

13
donné en reconnoissance – – à fin d’avoir rien qui me rappelle le Souvenir

14
d’un Sot, d’un vilain, d’un Scelerat, pour le quel j’ai profané la qualité

15
d’ami et la dignité d’honnete-homme.
Il
me faut condescendre à ces

16
pauvretés-là, parcequ’il m’a entretenu quelque fois de sa generosité, dont il

17
Vous a comblé p. e. robbe de chambre, precieuse canne d’Espagne. A

18
l’egard de ces 2 tableaux, dont il Vous a fait present, il a eté assez sincere

19
de m’avouer, qu’il Vous les offroit pour
Vous
gagner quelques Guinées,

20
qu’il vouloit feindre d’avoir payé pour la voiture d’un Coffre. Mais le

21
coffre et les livres furent à moi et je me suis preté à plusieurs de

22
ses folies pour menager son imbecillité et
pour me le gener
pas trop par

23
l’inegalité de nos principes et de nos moeurs. Pendant son voyage de

24
Bath
Kur- und Vergnügungsort der feinen Gesellschaft, nahe Bristol
Bath il s’eleva un bruit entre quelques femmes, qu’il fut entretenu par

25
Vous et sous des conditions aussi scandaleuses que honteuses; qu’on Vous

26
avoit epié dans le lit avec lui dans une visite de midi &c. J’en fus petrifié

27
et je fis tout pour m’
eclairir
. Vos lettres me dirent la meme chose, sa

28
dependance de Vous &c. Vous le chargez de l’attendre à 11 heures avant

29
midi entre les draps &c. enfin je reconnus le meme caractere d’ecriture,

30
la meme fureur de passion, que ce nigaud m’avoit fait voir au

31
commencement de notre connoissance dans quelques lettres, qu’il pretendoit

32
etre ecrites par une fille de qualité, que je connois. Ce n’est pas à Vous,

33
Monsieur, de juger de ma surprise, de mon indignation et de la rage,

34
dans la quelle cette decouverte me jetta. Je voulois rompre brusquement

35
avec lui et eclater; enfin apres une foule de resolutions tumultueuses, je

36
m’avisai de me decouvrir à lui et dissayer des voies plus douces – –

37
Il fallut m’emparer d’une elite de vos lettres les plus masquées pour la

S. 238
conviction de sa mechanceté et les plus convenables à
ces dessein important

2
mon usage – –. I fallut encore renouer avec lui, truover l’opportunité

3
la plus favorable à cet dessein important – Il s’est apperçu d’un changement

4
dans ma conduite, it s’en est douté, it s’est rassuré enfin il s’est determiné

5
avec un aveuglement, avec une bassesse – – Et moi, Monsieur, je me suis

6
determiné aussi, mais par desespoir de reussir dans mon Heroisme pour

7
supporter plus longtems et pour sauver ce Monstre amphibie – – Encore

8
un coup, je suis determiné, mais par desespoir – – C’est pourquoi j’ai pris

9
le parti de m’adresser à Vous pour ne me passer d’aucun menagement

10
possible; car il ne s’agit pas seulement de faire le bien mais encore de le

11
bien faire. Je ne veux que rompre ces chaines de Belial – – c’est la seule

12
satisfaction, que je me veux permettre
à moi meme
contre un malhureux

13
qui est à tous egards au dessous de mon attention et de ma vengeance, qui

14
me fait pitié sans meriter meme mon mepris. Vos Secrets ont deja eté dans

15
la bouche de 3 femmes que je connais et à la merci de trois domestiques;

16
et j’ai des preuves assez authentiques et suffisantes à soutenir leur

17
temoignage. Ne me provoquez point aux extremités. Je Vous assure sur ma

18
parole et sur ma foi, que je n’ai aucun autre but de mes demarches, que de

19
Vous detromper, que de Vous tirer d’une alliance, dont les Suites ne

20
manqueront jamais de Vous ruiner d’une manière ou d’autre et enfin d’avancer

21
un divorce par des considerations de Votre honneur et de Votre interet, que

22
Vous serez assez tot forcé de faire par crainte, par honte ou par des motifs

23
plus pressans.
Je
Vous
donnerai
aurez une preuve de ma sincerité

24
par
dans la remise volontaire de ces
les ces
lettres qui Vous interessent,

25
que je ne veux garder
ai
que jusqu’au moment où je serai convaincu de

26
Vos resolutions.

27
Mais parler raison à des ames raccornies, eteintes, mortes à tout

28
sentiment de nature et de conscience; n’est-ce pas precher, comme St. Antoine,

29
l’Evangile aux poissons? Pour etre entendu des hommes, il faut les eveiller

30
par des traite
plus piquans. Donnez le paquet au sens commun, à la morale,

31
à la religion – – autant en emporte le vent – – – A la bonne heure; en voici

32
pour la force!

* *


33
Ne soyez point surpris, Monsieur, qu’il m’a montré lui-meme Vos

34
poulets; il a eu la betise de me faire lire une lettre, ecrite de sa propre main d’un

35
pretendu Baron de – – – à son frere – – – qui a couru
le monde
sous la

S. 239
qualité d’un menetrier.
Personne ne sauroit etre
Je n’ai jamais eté la

2
duppe de cette forgerie grossiere; car les sentimens de cette lettre

3
respiroient trop la roture et
so
le style ressembloit trop au baragouin ou

4
Pedlar-French d
u
e
vrai
son auteur veritable pour le meconnoitre.

5
Ce n’est pas peut etre le defaut de son education, qu’il ne sache epeler la

6
langue de son pays; ni non plus le defaut de la bonne compagnie, qui m’a

7
juré d’avoir vu à Paris qu’il n’en ait pris ni le ton ni les manières.

8
On m’a fait un conte
assez
plaisant de sa Tabatière garnie du portrait

9
d’un homme qu’il qualifie
de son Pere
– – Pendant que Vous encensez son

10
petit idole en miniature, par des soupirs, par des larmes, par des caresses

11
idolatres, dans des agonies voluptueuses pour l’absence de l’original – –

12
l’ingrat se joue de Votre Copie en chargeant son crime par l’idée d’inceste –

13
à Dieu ne plaise que Vous fussiez
et son
quod dicere nolo
.

14
Je ne connais à Mr. le Baron de – – – aucun autre Parent en Angleterre

15
Cousin
im Argot auch mit der Bedeutung ‚Denunziant‘ versehen
qu’un Cousin
très
proche en vertu de
Cocuage
. Ce Cousin dont Vous n’avez

16
rien peut-etre entendu jusqu’à present, est l’infortuné Chevalier – – – le

17
Cadet, qui a eté disgracié et
cassé
cassé de la manière la plus criante malgre

18
l’universalité de ses talens, l’unanimité de coeur et d’esprit et les services

19
signalisés, qu’il lui a rendu en Camerade, en Favori, en valet de chambre,

20
Ministre d’industrie
Gauner; vgl Hamanns
Glose Philippique
(N II S. 292/23), wo in Anm. 4 diese Bezeichnung auf Falstaff (etwa im Sinne von Amüsierkumpan) angewendet ist.
en Cuisinier, en Maquereau, en Ministre d’industrie… Oui, Monsieur, en

21
Ministre d’industrie. En voici une preuve qui Vous fera juger que ce

22
garçon honnete avoit un genie fertile en ressources de Finance – Mr. le

23
Baron a un Banquier à Londres, qui reçoit les revenues de ses terres, qu’il

24
m’a decrit tant de fois comme l’homme le plus heteroclite, le Diable le plus

25
anglois, qui
il
l’a fait peter si souvent contre tout ce pays, et qu’il a eté

26
obligé d’attraper toujours par des ruses, des tours d’adresse. Son fidele

27
Ecuyer fut l’inventeur de celui-ci. Il fallut feindre une perte accidentelle

28
de l’argent, qui lui avoit eté remis, pour rendre ce mensonge probable il en

29
fallut publier un avis dans les Gazettes et accorder une recompense

30
raisonnable au trouveur d’une bourse qu’il n’avoit jamais perdu pour avoir plus

31
d’argent à perdre. Car je connais Mr. le Baron comme excellent Chymiste

32
de ses gages.

33
Sur le fait d’alliance du Baron avec le dit Chevalier it ne vaut pas la

34
peine de m’expliquer. Le principe de Charité est communicatif; il employe

35
une partie de celle, qui le fait vivre lui-meme, pour entretenir… J’ai eté

36
bien surpris, il est vrai de son aveuglement et de son insensibilité dans une

37
matiere ordinairement assez delicate; je fus meme assez bete de prendre

S. 240
plus vivement part
de
que lui-meme de son affront et de son malheur:

2
mais à present je reconnais toutes les choses dans leur ordre et dans leur vrai

3
jour. – – Le Public sera peut – etre bien aise de se rejouir de la

4
Caricature et des Anecdotes d’un homme si extraordinaire, si unique, si

5
merveilleux. Il est dommage, qu’un merite si superieur soit enseveli dans

6
l’obscurité. Non, il est digne d’etre affiché aux femmes publiques en taurreau

7
S… et G…
vmtl. Sodom und Gomorrha
banal et aux courtisans de S… et G… en che… d’homme.

8
Je ne Vous ecrirai plus, Monsieur. J’ai ajouté le Comique au ton serieux.

9
Prenez Vos resolutions – – – Je m’en lave les mains et suis Votre

10
très humble serviteur.

Provenienz

Druck ZH nach den unpublizierten Druckbogen von 1940. Original verschollen. Letzter bekannter Aufbewahrungsort: Staats- und Universitätsbibliothek Königsberg, Msc. 2552 [Roths Hamanniana], II 69.

Bisherige Drucke

Karl Hermann Gildemeister (Hg.): Johann Georg Hamann’s, des Magus im Norden, Leben und Schriften. 6 Bde. Gotha 1857–1868, I 122.

ZH I 236–240, Nr. 108.

Textkritische Anmerkungen

Der Brieftext wurde anhand der überlieferten Quellen (vgl. Provenienz) kritisch geprüft. Notwendige Korrekturen gegenüber dem in ZH gedruckten Text wurden vorgenommen und sind vollständig annotiert. Die in den beiden Auflagen von ZH angehängten Korrekturvorschläge werden vollständig aufgelistet, werden aber nur dann im Text realisiert, sofern diese anhand überlieferter Quellen verifiziert werden konnten.
237/1
Vous etez ou abusé
]
Korrekturvorschlag ZH 2. Aufl. (1988):
Vous etiez vous abusé
conj.
237/15
Il
]
Geändert nach Druckbogen (1940); ZH:
I
237/22
pour me le gener
]
Korrekturvorschlag ZH 1. Aufl. (1955):
lies
pour ne le gener

Korrekturvorschlag ZH 2. Aufl. (1988):
pour ne le
237/27
eclairir
]
Korrekturvorschlag ZH 2. Aufl. (1988):
eclaircir
238/30
par des traite
]
Korrekturvorschlag ZH 1. Aufl. (1955):
lies
par des traits

Korrekturvorschlag ZH 2. Aufl. (1988):
traits
238/35
le monde
]
Geändert nach Druckbbogen (1940); ZH:
la monde

Korrekturvorschlag ZH 2. Aufl. (1988):
le monde
239/8
assez
]
Geändert nach Druckbogen 1940; ZH:
asez
239/9
de son Pere
]
Geändert nach Druckbogen (1940); ZH:
se son Pere

Korrekturvorschlag ZH 1. Aufl. (1955):
lies
de son Pere

Korrekturvorschlag ZH 2. Aufl. (1988):
de son
239/13
et son
]
Druckbogen 1940 und ZH:
son Pere it son
Korrekturvorschlag ZH 1. Aufl. (1955):
lies
et son

Korrekturvorschlag ZH 2. Aufl. (1988):
et son
239/15
très
]
Geändert nach Druckbogen 1940; ZH:
trés